Des épreuves d’une mère monoparentale à une maison à soi: L'histoire de Bernadette
Comment Habitat a aidé Bernadette à bâtir un avenir meilleur pour sa famille
« Nous n’y serions pas arrivés sans Habitat », raconte Bernadette. «Arrivés », c’est trois enfants diplômés de l’université et une hypothèque payée – des choses qu’elle n’aurait jamais pu imaginer il y a quelques décennies, alors qu’elle élevait ses enfants seule et gagnait à peine onze dollars l’heure.
Avant de s’associer à Habitat pour l’humanité Huronie, il y a 19 ans, Bernadette vivait dans un logement social à Barrie, en Ontario, avec ses trois enfants. Elle avait quitté Moose Jaw, en Saskatchewan, quelques années plus tôt pour refaire sa vie dans cette petite ville. Elle espérait ainsi éloigner ses enfants d’un père violent et alcoolique.
Bernadette décrit sa dernière année à Moose Jaw comme « une période terrorisante de notre vie ». Quand elle quitte son mari, ses jumelles ont à peine cinq ans et son fils, trois. En attendant que les deux aînés terminent leur année scolaire, elle loge avec ses trois enfants tantôt chez des amis, tantôt chez sa mère. « Dans ce genre de situation, on n’a pas vraiment le loisir de planifier », explique-t-elle.
Après un an à Moose Jaw sans adresse fixe, sur l’invitation de sa sœur, Bernadette et ses enfants vont passer une partie de l’été en Ontario. Ils ont ainsi l’occasion de prendre du recul. Bernadette a l’occasion de faire le point et de réfléchir à ce qu’elle veut faire du reste de sa vie.
Quand sa sœur lui propose de rester en Ontario, Bernadette hésite. « C’était très différent de tout ce que j’avais connu », raconte-t-elle. Elle décide quand même d’envoyer quelques curriculums vitae à droite et à gauche. En un rien de temps, elle obtient un poste d’adjointe administrative dans une école de la région. Elle voit là un signe et, au bout de quelques semaines, ses enfants et elle-même déménagent officiellement à Barrie.
Avec son modeste revenu, elle se sent privilégiée de trouver un logement abordable, même si, comme elle l’avoue, c’était « limite ». Dans ce logement, ils étouffaient l’été et gelaient l’hiver. De plus, en raison du tabagisme de l’ancien locataire, les allergies de son fils se sont aggravées.
Au printemps 1999, son beau-frère lui montre une annonce publiée dans le journal par Habitat pour l’humanité. L’organisme construit une maison et cherche des familles pour s’associer au projet. Elle pose sa candidature, mais elle n’est pas retenue. Sa déception ne l’a pas empêché de refaire une demande à l’annonce d’une seconde construction, en 2001. Après une série d’entrevues, sa candidature est acceptée. « Ce fut vraiment un miracle pour nous », précise-t-elle.
En échange d’une hypothèque sans intérêt et indexée sur le revenu, les propriétaires d’une maison Habitat s’engagent à donner 500 heures de leur temps à Habitat. Les amis et la famille peuvent également contribuer à ces heures de bénévolat et, en tant que chef d’une famille de trois enfants, Bernadette demande de l’aide à son église. En quelques mois, sa « famille paroissiale » - comme elle les désigne – et elle-même avaient cotisé 1 000 heures de travail. Bernadette explique qu’elle avait réussi à trouver deux petites heures par jour – après le bureau, avant de se précipiter à la maison pour préparer le repas des enfants – pour contribuer à différentes tâches sur le chantier : niveler les pierres de la fondation, monter la charpente et isoler la maison, poser les cloisons sèches, peindre, installer des plinthes.
La maison fut terminée en août 2001. Depuis, ses enfants et elle-même sont installés dans cette maison chaleureuse. Chaque fois qu’elle jette un regard autour d’elle, Bernadette dit se rappeler combien elle a eu de la chance. C’est ici qu’elle a élevé trois enfants d’un premier mariage – Justine, Lauren et Jordan – et épousé un homme attentionné, Shane, avec qui elle a eu son quatrième enfant, Nolan.
« Il est si important d’avoir une maison à soi, un endroit où l’on se sent en sécurité, raconte-t-elle. J’ai toujours voulu que mes enfants ne se soucient pas du lendemain. » À titre d’adjointe d’enseignement, elle côtoie beaucoup d’enfants qui déménagent sans cesse. Il est donc difficile pour eux de s’enraciner, de se concentrer sur l’école et d’établir des liens avec leurs pairs. En donnant un port d’attache à ses enfants, elle espère leur avoir donné bien plus qu’une cour pour les glissades d’eau; une table à dîner sur laquelle jouer au Monopoly et à Trouble; un divan où s’écraser avec leur « doudou » pour regarder un film de Walt Disney en mangeant du maïs soufflé, ou une chambre à soi pour bien dormi. Cette maison est également l’endroit où ils ont étudié, rêvé et imaginé leur avenir.
Maintenant âgée de 25 ans, Justine, la fille de Bernadette est enseignante à temps plein en Colombie-Britannique. Sa sœur jumelle, Lauren, vient de terminer une maîtrise à l’Université de Guelph et consacrera la prochaine année au bénévolat et à l’envoi de demandes pour entrer dans une école vétérinaire. Son fils, Jordon, est également titulaire d’un baccalauréat et prévoit se lancer en droit. Son plus jeune fils, Nolan, ne sait pas encore ce qu’il veut faire plus tard – pour l’instant, il vit avec l’insouciance de ses 10 ans. Il joue à des jeux vidéo, au baseball et suit des leçons de musique.
Bernadette et sa famille ont pu se bâtir une sécurité financière tout en payant une hypothèque, ce qui leur a ouvert des horizons. Et maintenant que Bernadette et son mari, Shane, s’apprêtent à faire un ultime versement hypothécaire, leurs horizons s’élargiront davantage.
« C’est un peu surréaliste. Je ne sais pas comment expliquer ça », dit-elle. Le couple prévoit rester dans cette maison jusqu’à ce que leur plus jeune enfant soit majeur. Bernadette veut qu’il jouisse des mêmes privilèges que ses aînés. Quand les chambres des enfants seront toutes vides, le couple espère vendre la maison et utiliser les capitaux pour acheter quelque chose à l’extérieur de la ville. En attendant, étant donné qu’ils n’ont plus d’hypothèque à payer, Bernadette et son mari pourront remettre en état certaines choses qui attendent depuis longtemps. De plus, au printemps, Bernadette et sa soeur pourront emmener leur mère, qui en est à un stade avancé de démence, en Irlande.
« Elle a toujours voulu aller en Irlande, explique Bernadette. Et maintenant, nous pouvons l’y emmener. »